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Bosser à 20 minutes ou à quelques stations de métro dans une ville dynamique est vraiment un pur bonheur. Et c’est ce que vivent environ 20 % d’entre nous. Mais pour la frange restante, soit 80 %, ce n’est plus tout à fait vrai.
Si l’on en croit les statistiques de 2015, une partie grandissante des travailleurs effectue un trajet domicile-bureau d’environ 50 minutes ou plus… Et cette tendance est à la hausse. On pourrait s’arrêter là et dire que tout le monde devrait se rapprocher de son lieu de travail, ça semble logique. Ainsi, nous pourrions continuer dans la saturation des transports, la création de plus en plus d’immeubles dans des zones déjà bien encombrées et participer à la flambée des prix de l’immobilier. Pas sûr qu’on améliore notre qualité de vie dans ces conditions.
L’autre solution, c’est ce truc bizarre qui nous vient d’outre-Atlantique, que certains ont pu remarquer dans des films hollywoodiens pas si récents. Les Américains appellent ça le remote work, que nous traduirons en télétravail chez nous. Ils ont saisi très tôt les avantages de cette formule et sont devenus précurseurs en la matière. Les États-Unis comptent environ 43 % de télétravailleurs à l’heure actuelle.
Ça semble sympa chez eux. Mais chez nous, c’est resté longtemps associé à des caprices d’ados fainéants. Le genre d’idée qui prouvait à votre employeur que vous étiez un resquilleur de première, juste pour l’avoir évoqué une fois. Résultat, nous comptons en France moins de 6 % de télétravailleurs.
La France, un pays dans lequel ce modèle ne peut pas fonctionner ? Pas vraiment. Depuis peu, la loi a évolué tout comme les pratiques en entreprise. Le télétravail est une carte séduction qui est servie aux côtés du café gratuit et du baby-foot. Quid de la situation actuelle et retour d’expérience d’un expatrié au pays du télétravail made in France.
Hormis pour les métiers nécessitant une présence physique — un jardinier municipal aura beaucoup de mal à aménager les parterres floraux de la mairie depuis le salon de son appartement — une partie grandissante de la population pourrait travailler à distance. À la fin des années 90, an aurait pu croire à de la science-fiction. Mais le penser aujourd’hui est une forme de négation envers tous les changements qui s’opèrent depuis 10 ans, tant sur le plan des outils informatiques que des méthodes de travail modernes.
Posez-vous ces questions simples :
Si vous avez répondu « oui » à ces questions, il reste une dernière chose à vérifier :
Si c’est « oui » de nouveau, alors félicitations ! Vous êtes un candidat potentiel au télétravail. Mais dans ce cas, pourquoi êtes-vous à nouveau bloqué dans votre train à cause d’une nième rupture de caténaire , d’une grève, d’un suicide sur les voies (sûrement pas un télétravailleur) ou tout simplement à cause d’une météo capricieuse ?
L’une des explications du manque d’attrait envers le télétravail pourrait venir d’un management à l’ancienne.
Il est bien connu qu’un employé efficace doit avoir son patron, manager — ou toute autre personne désignée — en permanence sur son dos. Ainsi, on est rassuré. On sait que cette unité de travail fait effectivement un travail, qu’elle respecte les horaires de bureau et que ses pauses ne sont ni trop longues ni trop fréquentes.
Ce qui précède aurait pu être une caricature rédigée par la CGT mais c’est une
réalité pour une partie d’entre nous. Un modèle de management digne de
Caméra Café, cette série de 2001 diffusée sur M6. Il me vient en tête
l’un des épisodes : Jean-Claude usait d’une astuce dite « de la double
veste » pour faire croire qu’il était au bureau. Une tricherie qui
finira par se retourner contre lui. Plus efficace que la double veste de
Jean-Claude, nous disposons depuis plus de 20 ans du basculement
d’applications (alt
+ tabulation
). Astuce maîtrisée par tout
employé qui en a marre de se justifier sur tout.
Le présentiel n’est pas un rempart contre la démotivation, ni le gage d’un travail effectif. C’est juste une illusion de contrôle que nos managers devraient mettre définitivement dans la case des mauvaises pratiques.
Ce qui compte réellement n’est pas tant de savoir où le travail est réalisé mais de s’assurer qu’il est effectivement réalisé.
Les données d’une entreprise, c’est son trésor. Le pire qu’il puisse arriver, c’est qu’il se retrouve chez le concurrent. Le problème du télétravail, c’est qu’il faut ouvrir un accès. Ce simple fait peut justifier un refus de la part de votre employeur.
Mais soyons honnêtes. Sauf si l’on a peu de considération pour la sécurité informatique, cette raison ne tient pas debout. Car aujourd’hui il existe des solutions :
À moins que nos politiques ne décident d’affaiblir les techniques de chiffrement, ce qui serait assez stupide, l’accès depuis l’extérieur de l’entreprise ne présente pas plus de risque que ceux effectués en interne.
Loin de moi l’idée que le télétravail est une solution pour tout le monde. Il s’avère que pour une partie d’entre nous, nous n’en voulons tout simplement pas.
Les raisons peuvent être d’ordre organisationnel :
Il peut aussi s’agir de raisons psychologiques :
Même s’il y a des solutions, le choix de chacun doit être respecté.
Alors quoi ? C’est foutu ? On enterre l’idée et on continue dans notre modèle post-industriel ? Mais que dit la loi sur le sujet ?
Il est vrai que le télétravail devrait rester le choix du salarié. Et c’est en ce sens que la loi a été changée en septembre 2017. Aujourd’hui, il n’est plus nécessaire d’inclure le télétravail dans nos contrats de travail, ce qui assoupli son usage.
Si votre activité est compatible avec un travail à distance, l’option du télétravail vous est ouverte. Il peut s’agir d’un télétravail partiel, à temps complet (aucune heure effectuée au bureau) ou occasionnel. Dans les deux premiers cas, il faut un accord de branche ou d’entreprise. Mais dans le cas du télétravail occasionnel, un simple accord par e-mail suffit. Pensez-y aux prochaines grèves et autres empêchements.
Notez toutefois que l’employeur n’a pas l’obligation d’accepter, mais il devra motiver son refus. S’il accepte, je vous recommande :
Pour en savoir plus, je vous recommande cet article publié par le ministère du travail. Maintenant qu’on a tous les éléments, comment passer concrètement au télétravail ?
La première chose qui vient en tête lorsqu’on parle de télétravail, c’est de savoir quels outils utiliser. Mais en fait, c’est la seconde étape. La première étape est de préparer les esprits à travailler sous ce modèle. Ce qui veut dire :
Une fois qu’on est prêt dans sa tête, il faut s’équiper avec les outils adéquats.
Pour travailler à distance dans de bonnes conditions, il faut :
Avoir les bons outils permet de démarrer en télétravail. Mais ça ne fait pas tout, il faudra renforcer la cohésion d’équipe… Et c’est là que ça peut coincer pour le télétravailleur.
On a beau avoir tous les outils qu’il faut, la sensation d’isolement est toujours là et c’est un sentiment partagé par 65 % des télétravailleurs. Peut-on parler d’échec ? Peut-être pas, mais il faut trouver le bon rythme et la formule qui convient.
Le télétravail partiel est plébiscité par la majorité des employeurs qui ont sauté le pas. C’est une bonne approche, car elle apporte déjà de la plus-value en limitant le risque d’isolation. Mais il est toujours présent et il concerne davantage les télétravailleurs à temps complet (aucune heure passée au bureau). Dans les deux cas de figure, il faut combattre ce phénomène.
La visioconférence est la pierre angulaire du télétravailleur, car elle représente le seul contact direct qu’on peut avoir. Il faut donc provoquer les rencontres :
La messagerie instantanée est un bon moyen de donner des couleurs à une journée. Abusez-en pour tous les sujets, même ceux qui n’ont rien de professionnel. Le principal est de ne pas rester scotché sur des fils de discussion, mais d’utiliser les messages lors de nos coupures afin de lever la tête de l’écran (si on peut dire).
Avec tous ces outils, on pourrait penser qu’on peut vivre dans notre bulle virtuelle sans jamais rencontrer nos collègues pour de vrai. Un aperçu d’un monde ultra connecté futuriste, un peu comme dans le film Clones avec Bruce Willis. Tout comme on peut le constater dans le film, et bien que j’adore la technologie, le virtuel ne doit pas se substituer au réel.
S’enfermer au pays du virtuel n’est pas vraiment une chose à faire. Il faut donc revenir dans le monde réel via des rencontres avec les collègues : les membres d’équipes proches ou — si la structure est petite — toute la boîte. Cela permet de renforcer la cohésion entre nous. Et pour les télétravailleurs, c’est essentiel : ça amène du concret dans tout ce virtuel.
Chez Synbioz, nous organisons tous les 3 mois un rendez-vous avec toutes nos équipes. Ça peut être dans les bureaux ou en dehors, via une formule plus ou moins informelle et qui s’étale sur 2 ou 3 jours de folie.
On parle boulot bien sûr, retour d’expérience, idées farfelues, des envies pour notre boîte. On fait également des recherches en groupe ou des mini-projets. Et il y a les sorties pour s’aérer l’esprit. C’est un moment vraiment spécial et important pour tout le monde. Eh ! Avez-vous remarqué que sa photo sur l’intranet est vraiment vielle ? Il a une barbe épaisse maintenant !
Au-delà des rencontres, il y a aussi les évènements autour de nos produits technologiques : Rubyconf, ParisWeb, ElixirConf EU… N’oubliez pas non plus les meetups de vos régions pour échanger avec des personnes de tous horizons autour de vos technos favorites.
N’ayant pas fait directement l’expérience en ce sens, je précise aussi qu’on peut utiliser des espaces de coworking. C’est parfois une bonne solution et si on est plusieurs d’une même boîte, c’est encore plus chouette.
Si la réduction du temps de trajet était à l’origine de l’initiative, il y a pas mal d’autres gains qui viennent autour du télétravail :
À la base, je pensais qu’il n’y avait aucun avantage pour l’employeur. Le télétravail, c’est d’abord pour le salarié. Mais c’est faux. C’est un équilibre qui profite aux deux :
Je pense que cette évolution dans les méthodes de travail est dans l’air du temps. C’est quelque chose qui va transformer la relation à l’entreprise en donnant plus de souplesse dans nos modes de vie actuels.
Le télétravail chez Synbioz est une valeur inscrite dans son ADN depuis sa création en 2009. Après un passage par EuraTech, nous ouvrons nos bureaux à Lambersart (Lille). Ils deviendront très vite notre lieu de rencontre trimestriel pour tous les télétravailleurs, une partie de nos équipes étant éparpillée aux quatre coins de l’Hexagone (et parfois au-delà). Les collaborateurs à proximité sont en télétravail partiel (2 à 3 jours par semaine en choix libre) pendant que d’autres favorisent la présence au bureau. Aujourd’hui encore, nous continuons d’expérimenter. Mais il est indéniable que l’apport en termes de souplesse et de cohésion est tangible. C’est pourquoi nous pouvons parler de réussite dans notre cas.
Alors n’hésitez plus ! Essayez-vous au télétravail, sans brûler les étapes, en vous adaptant aux possibilités de chacun. Pour aller plus loin, je vous recommande cet ouvrage : « Remote: Office Not Required ».
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